Un jour, dit la légende, une femme tomba de la terre-du-ciel. Elle tomba par un trou laissé par un arbre déraciné et comme elle tombait, elle saisit dans ses mains une poignée de graines Elle tomba très longtemps. Sous elle, pas de Terre, seulement les eaux primordiales, et sur ces eaux, des oiseaux et des animaux aquatiques.
"Regardez" ! dirent-ils, quelqu’un vient. Alors, quelques oiseaux – des cygnes et des oies – s’envolèrent pour l’attraper sur leurs ailes. En bas, les autres créatures tinrent conseil. "Il faut trouver un endroit pour elle", dirent-ils. "Nous devons apporter la Terre". Alors, l’un après l’autre, ils plongèrent pour tenter de rapporter un peu de boue du fond de la mer. Tous échouèrent sauf le dernier – le rat musqué – (chez les Hurons, le crapaud, NDT). Il apporta une pleine poignée de boue humide.
"Maintenant, où la mettrons-nous ?" dirent-ils. "Mettez-la sur mon dos" répondit une voix profonde. C’était la Grande Tortue qui remontait des profondeurs. Quand ils eurent placé la terre sur le dos de la Grande Tortue, celle-ci se mit à grandir de plus en plus jusqu’à devenir ce continent sur lequel nous nous tenons, cette terre sur le dos de la Grande Tortue.
Alors la Femme-du-Ciel y fut placée par les oiseaux. Là, elle sema les graines qui devinrent de bonnes plantes.
Ainsi commence ce récit de la Création. C’est une très vieille histoire, mais pour certains, elle est aussi vraie et nouvelle que si cela était arrivé hier. Elle nous rappelle la relation qui existe entre toutes les choses, que nous, humains - petits enfants de la Femme-du-Ciel – existons à cause et en relation avec la totalité du monde vivant qui nous entoure.
La terre sous nos pieds est vivante (et les théories géologiques modernes avec les idées de plaques tectoniques et de dérive des continents se conforment bien à l’image de cette terre vivante sur le dos d’un gros animal lent).
C’est plus qu’un beau mythe, c’est une histoire avec laquelle nous devons vivre.
légende amérindienne
tirée de l’Anthologie de la poésie amérindienne,
Bacchanales n°22, revue de la Maison de la Poésie Rhône-Alpes
